La Société Civile Immobilière (SCI) est une structure prisée par les investisseurs immobiliers, permettant de faciliter la gestion et la transmission d’un patrimoine. Cependant, lors de la création d’une SCI, un choix fondamental s’impose : le régime fiscal applicable. Faut-il opter pour l’impôt sur les sociétés (IS) ou l’impôt sur le revenu (IR) ? Ce choix a un impact direct sur la fiscalité des revenus locatifs, la gestion des charges, ainsi que sur l’imposition des plus-values à la revente des biens. Cet article explore en détail les différences entre ces deux régimes à travers leurs avantages, inconvénients et des exemples concrets chiffrés pour aider à mieux comprendre les enjeux.
Sommaire
1. La SCI à l’Impôt sur le Revenu (IR)
Dans une SCI soumise à l’impôt sur le revenu, les revenus locatifs sont imposés directement entre les mains des associés, au prorata des parts détenues dans la société. Les bénéfices sont intégrés aux revenus fonciers de chaque associé, soumis à leur propre taux marginal d’imposition (TMI). Ce régime est souvent perçu comme le plus simple, mais il peut devenir pénalisant pour les contribuables aux revenus élevés.
Exemples chiffrés : SCI à l’IR (Impôt sur le Revenu)
Imaginons une SCI constituée par deux associés, chacun détenant 50 % des parts. La SCI possède un bien immobilier loué pour un revenu locatif annuel de 24 000 €. Après déduction des charges (intérêts d’emprunt, frais d’entretien, etc.) de 6 000 €, le résultat net est de 18 000 €.
- Chaque associé devra déclarer 9 000 € de revenus fonciers sur sa déclaration personnelle.
- Si un des associés se trouve dans la tranche marginale de 30 % (TMI), il sera imposé à 30 % sur ces 9 000 €, soit 2 700 € d’impôts.
- En plus de cet impôt sur le revenu, les prélèvements sociaux de 17,2 % s’appliquent, ce qui donne un total de 1 548 € (17,2 % de 9 000 €).
Total des impôts pour cet associé : 2 700 € (impôt sur le revenu) + 1 548 € (prélèvements sociaux) = 4 248 € d’impôt.
Dans ce cas, l’imposition sur les revenus locatifs peut être importante, surtout si l’associé est dans une tranche d’imposition élevée. Cependant, dans le cadre du régime de l’IR, la SCI bénéficie de plusieurs avantages, notamment la possibilité de déduire les charges et de profiter du régime des déficits fonciers.
Avantages de la SCI à l’IR
- Simplicité administrative : Pas besoin de tenir une comptabilité complexe, les associés déclarent simplement leur part des revenus locatifs sur leur déclaration personnelle.
- Déficits fonciers : En cas de charges supérieures aux revenus locatifs (par exemple, lors de travaux importants), le déficit foncier peut être imputé sur le revenu global des associés dans la limite de 10 700 € par an. Cela permet de réduire l’imposition globale.
- Transmission de patrimoine : En vue d’une transmission à long terme, la SCI à l’IR permet de conserver les abattements fiscaux en cas de donation ou succession, et d’éviter les contraintes liées à l’amortissement.
Inconvénients de la SCI à l’IR
- Imposition directe des revenus : Pour les associés ayant des revenus élevés, l’imposition peut être particulièrement lourde, puisque le taux marginal d’imposition peut atteindre 45 %, sans oublier les prélèvements sociaux de 17,2 %. Nous avons donc une impositions qui varie entre 17,2% et 62,2% en fonction de la TMI de l’associé.
- Absence d’amortissement : Contrairement à la SCI à l’IS, la SCI à l’IR ne permet pas de déduire l’amortissement des biens immobiliers. Cela peut limiter la déduction des charges et réduire l’optimisation fiscale.
2. La SCI à l’Impôt sur les Sociétés (IS)
Dans une SCI soumise à l’impôt sur les sociétés, les revenus locatifs sont d’abord imposés au niveau de la société elle-même, selon les règles applicables à l’IS. Le taux de l’IS est de 15 % sur les premiers 42 500 € de bénéfice, puis de 25 % au-delà. Une des principales différences avec la SCI à l’IR réside dans la possibilité de déduire l’amortissement des biens, ce qui permet de diminuer la base imposable. S’il est distribué aux associés, il sera taxé au PFU de 30%.
Exemples chiffrés : SCI à l’IS
Prenons le même exemple d’une SCI générant 24 000 € de revenus locatifs et 6 000 € de charges annuelles, pour un bénéfice net de 18 000 €. La particularité avec la SCI à l’IS est qu’il est possible de déduire l’amortissement du bien immobilier.
- Si l’amortissement du bien est fixé à 10 000 € par an, le bénéfice imposable n’est plus que de 8 000 € (18 000 € – 10 000 €).
- L’impôt sur les sociétés appliqué à ce bénéfice sera de 15 %, soit 1 200 € (15 % de 8 000 €).
- Si les associés souhaitent se verser des dividendes, ces derniers seront imposés lors de la distribution (prélèvement forfaitaire unique de 30 %).
Total des impôts au niveau de la SCI : 1 200 € (impôt sur les sociétés). Ensuite, si les associés se versent 8 000 € de dividendes, ils paieront 30 % (PFU) d’impôt sur cette somme (2 400 €).
Avantages de la SCI à l’IS
- Amortissement des biens : L’un des plus grands avantages de la SCI à l’IS est la possibilité de déduire l’amortissement des biens immobiliers. Cela permet de réduire considérablement le bénéfice imposable et, par conséquent, les impôts à payer.
- Optimisation fiscale : Pour des investisseurs souhaitant maximiser les déductions à court terme, la SCI à l’IS est souvent plus attractive. Les amortissements, les frais financiers et autres charges déductibles permettent de réduire la fiscalité à court terme.
- Taux d’imposition avantageux : Le taux de l’IS à 15 % sur les premiers 42 500 € est souvent plus faible que le taux d’imposition personnel des associés, surtout pour ceux se situant dans les tranches marginales élevées de l’impôt sur le revenu.
Inconvénients de la SCI à l’IS
- Gestion plus complexe : La SCI à l’IS impose une comptabilité plus lourde. Il est nécessaire de tenir une comptabilité conforme aux règles des sociétés commerciales et de faire appel à un expert-comptable, ce qui génère des frais supplémentaires.
- Plus-value à la revente : En cas de revente d’un bien détenu par une SCI à l’IS, la plus-value imposable est calculée sur la base de la valeur comptable du bien, qui a été réduite par les amortissements. Cela peut entraîner une forte imposition des plus-values, rendant la revente moins avantageuse que dans une SCI à l’IR.
- Distribution des dividendes : Lorsque les associés se versent des dividendes, ces sommes sont à nouveau imposées, ce qui crée une double imposition (impôt sur les sociétés, puis impôt sur les dividendes).
Exemples chiffrés : plus-value à la revente
Prenons un bien immobilier acheté pour 300 000 € et amorti sur 30 ans à raison de 10 000 € par an. Après 10 ans, le bien a été amorti de 100 000 €, ce qui réduit sa valeur comptable à 200 000 €. Si le bien est vendu pour 400 000 €, la plus-value imposable sera calculée sur la différence entre le prix de vente (400 000 €) et la valeur comptable nette (200 000 €), soit une plus-value de 200 000 €.
- Cette plus-value sera soumise à l’impôt sur les sociétés à 25 %, soit un impôt de 50 000 €.
3. Quel régime choisir ?
Le choix entre une SCI à l’IS et une SCI à l’IR dépend de plusieurs facteurs, notamment les objectifs d’investissement, la durée de détention du bien et la situation fiscale des associés.
Cas d’une SCI à l’IR (Impôt sur les Revenus) adaptée :
- Investisseurs à long terme : Si l’objectif est de conserver le bien immobilier pendant de nombreuses années et de le transmettre aux héritiers, la SCI à l’IR est souvent plus avantageuse, surtout en termes de fiscalité des plus-values.
- Revenus locatifs modérés : Pour des investisseurs dont les revenus locatifs ne sont pas très élevés, l’imposition directe à l’IR peut être moins pénalisante, surtout s’ils sont dans une tranche d’imposition faible à moyenne.
Cas d’une SCI à l’IS (Impôt sur les Sociétés) adaptée :
- Optimisation fiscale à court terme : Si l’objectif est de maximiser les déductions fiscales et de limiter l’imposition des revenus locatifs, la SCI à l’IS est plus favorable grâce à la déduction de l’amortissement.
- Investisseurs en tranches élevées : Pour les investisseurs situés dans les tranches marginales élevées de l’impôt sur le revenu, l’imposition à l’IS à 15 % sur les premiers 42 500 € de bénéfice peut être beaucoup plus avantageuse que l’imposition directe à l’IR.
Comment changer de régime fiscal ?
Pour procéder au changement du régime fiscal de la SCI, la décision doit être votée à l’unanimité des associés en assemblée générale de SCI.
Les associés doivent notifier par écrit le Service des impôts des entreprises (SIE) compétent leur souhait de changer le régime fiscal de la SCI au plus tard dans les 3 premiers mois de l’exercice à compter duquel ils souhaitent faire jouer l’option.
La lettre de notification doit comporter un certain nombre d’informations :
- Raison sociale de la SCI
- Adresse du siège social
- Nom, prénom et adresse de chaque associé
- Répartition du capital social de la SCI
La notification doit être signée dans les conditions prévues par les statuts ou, en l’absence de stipulation contractuelle, par l’ensemble des associés.
L’option peut être exercée à l’occasion de la déclaration d’une modification de l’entreprise, notamment la modification des statuts de la SCI.
Couts associés
Les SCI soumises à l’IS doivent tenir une comptabilité irréprochable. Cette obligation est synonyme de frais supplémentaires, notamment si l’assistance d’un expert-comptable est nécessaire, dans ce cas il faut compter environ 1200€HT/an.
Conclusion
- Obligation d’opter pour la SCI à l’IS dans certains cas : Lorsqu’un investisseur immobilier ne peut pas supporter le poids de l’impôt sur le revenu, la SCI à l’IS devient une nécessité. Elle permet de différer le paiement des impôts jusqu’à la vente de l’immeuble. Par exemple, s’il doit s’acquitter de 225 286 € d’impôts sur 17 ans (soit 13 252 € par an), la question est : a-t-il la capacité financière de le faire ?
- Préférence pour la SCI à l’IR en cas de plus-value significative : Si l’investisseur peut assumer l’impôt sur le revenu foncier et anticipe une plus-value importante après 20 ans, la SCI à l’IR est plus avantageuse. Par exemple, dans le cas d’une cession à 1M€, la taxation à 40% sur la plus-value dans une SCI à l’IS génère un écart substantiel, rendant l’option IR beaucoup plus favorable.
- Avantage de réinvestir avec une SCI à l’IS : Si, après une vente, la SCI à l’IS réinvestit dans un actif immobilier ou financier, elle évite de payer le prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30%. Dans ce cas, elle économiserait 148 500 €, ce qui en fait une option avantageuse à long terme et lors de la revente.
- SCI à l’IS idéale pour le démembrement des parts : Si vous démembrer les parts de la SCI et la conservez longtemps dans le cadre familial, l’imposition sur la plus-value ou les distributions n’aura pas lieu. Dans cette situation, la SCI à l’IS s’avère être le meilleur choix.
- Choix dicté par la capacité de financement : Pour un investisseur ayant des moyens limités et cherchant à préparer une retraite complémentaire, l’objectif n’est pas de maximiser le rendement sur 20 ou 30 ans. Il s’agit de choisir l’option qui permet de réaliser l’opération tout en générant des revenus à la retraite. Dans ce cas, le banquier qui finance l’investissement peut être décisif dans le choix entre IR et IS.
- Rentabilité mesurée par le taux de rendement interne (TRI) : En évaluant la rentabilité sur 20 ans, on observe un TRI de 7,2 % pour la SCI à l’IR et de 11,3 % pour la SCI à l’IS. En termes de rendement pur, la SCI à l’IS se révèle plus rentable, car elle permet de différer le paiement de l’impôt.
En résumé, aucune conclusion universelle ne peut être tirée. Une analyse spécifique est toujours nécessaire. Toutefois, le grand avantage de la SCI à l’IS est de reporter le paiement des impôts à la vente de l’immeuble, moment où les associés ont les liquidités pour payer.