La mondialisation et la mobilité accrue des capitaux et des personnes ont complexifié la fiscalité internationale. Les conventions fiscales internationales, l’imposition des revenus étrangers, la double imposition et la fiscalité des expatriés sont des thèmes centraux pour les gouvernements, les entreprises et les particuliers.
Cet article expose de manière pratique le rôle des conventions, l’imposition des revenus étrangers, le double Imposition ainsi que la fiscalité des expatriés en fournissant des exemples concrets pour illustrer chaque point.
Sommaire
1. Le rôle des conventions internationales dans le domaine de la fiscalité internationale
1.1. Introduction aux conventions fiscales
Les conventions fiscales internationales (CFI) sont principalement bilatérales, conclues entre deux États pour résoudre diverses difficultés susceptibles de conduire à des doubles impositions. Ces conventions ont généralement une structure similaire : elles comprennent une série d’articles couvrant des situations spécifiques et des types de revenus imposables, tels que les loyers, les bénéfices des entreprises et les plus-values.
Dans ces conventions, on trouve également une liste de définitions centrales qui délimitent le champ d’application des règles fiscales. En outre, elles contiennent des dispositions visant à résoudre les problèmes de double imposition en déterminant quel pays a le droit d’imposer dans une situation donnée et en définissant les retenues à la source avec des montants précis.
Les conventions fiscales bilatérales sont souvent basées sur un modèle établi par l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE). Les travaux de l’OCDE sont cruciaux car ils fournissent des modèles de conventions ainsi que des commentaires et des explications permettant de comprendre la portée des textes. Bien que l’OCDE ne soit pas une organisation internationale contraignante, ses modèles sont largement adoptés volontairement par les États et jouent un rôle significatif dans l’interprétation du droit fiscal. Ainsi, des décisions judiciaires françaises font souvent référence à ces modèles de l’OCDE.
Cependant, le système des CFI présente une faiblesse : pour modifier une convention, il faut l’accord des deux parties signataires, rendant chaque changement dépendant d’un nouvel avenant. Pour remédier à cela, l’OCDE a proposé un instrument multilatéral permettant d’introduire de nouvelles dispositions communes à tous les États participants. Cet instrument permet de modifier simultanément plusieurs conventions bilatérales auxquelles un État, comme la France, est partie.
Cet instrument multilatéral est utilisé pour surmonter les limites des conventions bilatérales, notamment concernant la notion d’établissement stable, qui est inadéquate pour appréhender les nouvelles activités économiques, notamment numériques. Pour lutter contre les failles des conventions bilatérales et les stratégies d’optimisation fiscale, cet instrument permet d’adapter les conventions fiscales de manière plus efficace et coordonnée.
Ces CFI visent à :
- Éviter la double imposition : Elles établissent des mécanismes pour éviter que les mêmes revenus ne soient imposés deux fois.
Lorsqu’une entreprise développe une activité à l’étranger, générant des bénéfices imposés dans ce pays, l’État de résidence de l’entreprise peut estimer que cette activité est fortement liée à son territoire. Ainsi, il impose également ces bénéfices, entraînant une double imposition où la même activité est soumise à deux législations fiscales distinctes.
- Prévenir l’évasion fiscale: Elles encouragent la transparence et la coopération entre administrations fiscales.
- Promouvoir la coopération économique : En rendant la fiscalité plus prévisible, elles facilitent les investissements et les échanges commerciaux.
– Fournir une sécurité juridique aux contribuables : Elles clarifient les obligations fiscales des individus et des entreprises opérant à l’international.
1.2. Mécanismes des conventions fiscales
Les conventions fiscales mettent en place plusieurs mécanismes pour atteindre leurs objectifs :
- Répartition des droits d’imposition : Elles définissent quel pays a le droit d’imposer quels types de revenus, réduisant ainsi les risques de double imposition.
- Méthode de l’Imputation : cette méthode permet aux deux États de percevoir l’impôt sur le même revenu. Cependant, elle offre au contribuable la possibilité de déduire de son impôt dans son pays de résidence l’impôt payé à l’étranger. En d’autres termes, dans l’État de résidence du contribuable, ce dernier peut déduire l’impôt déjà payé dans l’État où le revenu a été généré
Dans cette approche, l’impôt payé à l’étranger devient un crédit d’impôt dans l’État de résidence.
Exemple Concret : Supposons que je sois résident de l’État A et que je possède un actif à l’étranger qui génère un revenu, comme un prêt qui me rapporte des intérêts. Les intérêts proviennent de l’étranger car le débiteur est situé à l’étranger, ce qui signifie que ce revenu a une source étrangère et est soumis à une retenue à la source à l’étranger.
Lorsque ce revenu arrive en France, où je réside et où je suis imposé, je suis en droit de payer l’impôt en France tout en déduisant l’impôt payé à l’étranger. Ainsi, l’impôt payé à l’étranger devient un crédit d’impôt en France.
– Exemption de certains revenus : Elles peuvent exempter certains types de revenus de l’imposition dans l’un des pays signataires.
1.3. Exemple Concret : convention France-Allemagne
Prenons l’exemple d’un ingénieur français travaillant pour une entreprise allemande tout en résidant en France. La convention fiscale entre la France et l’Allemagne stipule que la France a le droit principal d’imposer ce revenu, mais l’Allemagne peut également imposer ce revenu à un taux réduit. Pour éviter la double imposition, la France accorde un crédit d’impôt égal à l’impôt payé en Allemagne. Ainsi, l’ingénieur ne paie pas deux fois des impôts sur le même revenu.
2. Imposition des revenus perçus de l’étranger
2.1. Principes généraux
Les pays adoptent généralement l’un des deux principes suivants pour l’imposition des revenus :
- Principe de résidence : Les résidents sont imposés sur leurs revenus mondiaux, quel que soit le lieu où ils sont générés.
– Principe de territorialité : Seuls les revenus de source locale sont imposés.
2.2. Crédits d’impôt et exemptions
Pour éviter la double imposition des revenus étrangers, les pays utilisent des crédits d’impôt et des exemptions. Le crédit d’impôt permet au pays de résidence de déduire de son impôt l’impôt payé à l’étranger. L’exemption exclut certains revenus étrangers de l’imposition.
2.3. Exemple concret : dividendes américains pour un résident français
Un résident français qui perçoit des dividendes d’actions américaines pourrait être soumis à l’impôt aux États-Unis (source des revenus) et en France (résidence). Grâce à la convention fiscale entre la France et les États-Unis, la France accorde un crédit d’impôt pour l’impôt payé aux États-Unis, évitant ainsi une double imposition. Par exemple, si l’impôt américain sur les dividendes est de 15 %, ce montant sera crédité contre l’impôt français dû.
3. Fonctionnement de la double imposition
3.1. Définition de la double imposition
La double imposition survient lorsque deux pays imposent simultanément le même revenu. Cela peut décourager les activités économiques transfrontalières et engendrer des charges fiscales excessives pour les contribuables.
3.2. Mécanismes d’évitement de la double imposition
Les conventions fiscales incluent des mécanismes pour éviter la double imposition :
- Crédit d’impôt : Le pays de résidence accorde un crédit pour l’impôt payé dans le pays de source.
- Exemption : Le pays de résidence exempte certains revenus étrangers.
– Répartition des droits d’imposition : Les revenus sont alloués à un seul pays pour l’imposition.
3.3. Exemple concret : salarié Français en mission au Canada
Un salarié français détaché au Canada par son employeur français sera imposé au Canada sur ses revenus de travail pour la période de son séjour, selon la convention fiscale entre la France et le Canada. En France, ce salarié bénéficiera d’un crédit d’impôt égal à l’impôt payé au Canada, évitant ainsi une double imposition. Par exemple, si le salarié paie 25 % d’impôt sur son revenu au Canada, il obtiendra un crédit d’impôt équivalent en France.
4. Fiscalité pour un expatrié
4.1. Régimes fiscaux spécifiques pour les expatriés
Les expatriés sont soumis à des régimes fiscaux spécifiques qui dépendent de leur statut de résidence et des conventions fiscales entre leur pays d’origine et leur pays de résidence. Les régimes peuvent varier considérablement et inclure des exemptions, des crédits d’impôt et des déductions particulières.
4.2. Résidence fiscale et imposition
La détermination de la résidence fiscale est cruciale pour les expatriés. Les critères de résidence fiscale incluent généralement :
– La durée de séjour dans un pays
– Les liens personnels et économiques avec le pays
– Le domicile ou le lieu de résidence principale
Comment déterminer sa résidence fiscale?
4.3. Exemple concret : expatrié français aux Émirats Arabes Unis
Un expatrié français vivant aux Émirats Arabes Unis, un pays sans impôt sur le revenu, pourrait être imposé en France sur ses revenus mondiaux s’il conserve sa résidence fiscale en France. Cependant, la France offre des mesures d’exemption pour certains types de revenus étrangers. Par exemple, si cet expatrié perçoit des revenus de source étrangère tout en travaillant pour une entreprise des EAU, ces revenus pourraient être exemptés d’impôt en France, à condition de respecter certains critères (comme la durée de séjour à l’étranger).
4.4. Cas particulier : impôt sur les revenus locatifs pour les non-résidents
Un non-résident français possédant une propriété locative en Espagne pourrait, sans convention fiscale, être imposé en Espagne (où la propriété est située) et en France (son pays de résidence). La convention fiscale entre la France et l’Espagne permet d’éviter cette double imposition en accordant un crédit d’impôt en France pour les impôts payés en Espagne.
5. Avantages et limites des conventions fiscales
5.1. Avantages des conventions fiscales
Les conventions fiscales offrent plusieurs avantages :
- Réduction de la double imposition : Elles permettent aux contribuables de ne pas payer deux fois des impôts sur les mêmes revenus.
- Prévention de l’évasion fiscale : Elles favorisent la transparence et l’échange d’informations entre les administrations fiscales.
- Promotion des investissements transfrontaliers : Elles créent un environnement fiscal plus prévisible et attractif pour les investisseurs étrangers.
– Sécurité juridique : Elles apportent une certitude juridique aux contribuables sur les règles fiscales applicables.
5.2. Limites des conventions fiscales
Malgré leurs nombreux avantages, les conventions fiscales présentent aussi des limites :
- Complexité et Conformité : Les conventions fiscales sont souvent complexes, nécessitant une compréhension approfondie pour une application correcte. Les contribuables et les entreprises doivent naviguer dans des systèmes fiscaux différents et comprendre les interactions entre eux.
- Évolutions Réglementaires : Les législations fiscales changent fréquemment, ce qui peut rendre certaines dispositions obsolètes ou inadaptées. Les conventions doivent être mises à jour régulièrement pour refléter ces changements.
- Disparités entre Pays : Tous les pays ne disposent pas de conventions fiscales bilatérales, ce qui peut entraîner des inégalités pour les contribuables. De plus, les conventions peuvent varier en termes de générosité et de portée, créant des distorsions.
Conclusion
Les conventions internationales jouent un rôle crucial dans le domaine de la fiscalité, en apportant des solutions à la double imposition et en favorisant la coopération économique entre les pays. L’imposition des revenus étrangers, les mécanismes pour éviter la double imposition et les régimes spécifiques pour les expatriés sont essentiels pour assurer une fiscalité équitable et efficace dans un contexte de mondialisation croissante. Les contribuables et les professionnels de la fiscalité doivent comprendre ces aspects pour garantir la conformité fiscale et optimiser leurs obligations fiscales globales.
Grâce aux conventions fiscales, les contribuables bénéficient d’une plus grande sécurité juridique, d’une réduction de la double imposition et d’un environnement